Observatoire des médias sociaux en relations publiques

Fiches de lecture

Une lecture de l’œuvre de Michel de Certeau : L’invention du quotidien, paradigme de l’activité des usagers

Proulx, Serge. 1994. « Une lecture de l’œuvre de Michel de Certeau : L’invention du quotidien, paradigme de l’activité des usagers. » Communication. Vol. 15. No. 2. p. 170-197.

Résumé de l’éditeur

À partir d’une lecture de l’œuvre de Michel de Certeau intitulée L’invention du quotidien : Arts de faire, l’auteur discute de la pertinence des thèses de ce penseur pour l’étude des médias et, en particulier, pour le développement d’approches renouvelées concernant les phénomènes liés à la réception médiatique. Après une présentation de la problématique de l’auteur – orientée vers la créativité des pratiques quotidiennes – et de son cadre théorique (aux références linguistiques, polémologique et sociologique), il traite plus spécifiquement des possibilités et des limites de cette pensée pour approcher les médias. Ainsi, les exemples de la piraterie télématique et du zapping montrent combien le pouvoir de résistance culturelle des individus est limité et doit être décrit dans le contexte d’un espace communicationnel imposé par les responsables de l’offre technologique.

Mots clés


Michel De Certeau, nouveaux objets, usages, appropriation, Serge Proulx, communication, paradigme.

Mise en contexte


Écrit au début des années 90, dans une perspective critique, alors que de plus en plus de chercheurs réduisent leur intérêt pour la culture de l’institutionnel pour s’intéresser à la culture de l’ordinaire, Serge Proulx effectue un travail colossal en décortiquant l’œuvre de Michel de Certeau. L’invention du quotidien, paradigme de l’activité des usagers est un document riche en réflexions mais difficile d’accès en raison de sa prose alambiqué.  Bien que l’ouvrage ne porte pas spécifiquement sur les problématiques propres à la communication, Proulx réussi à transposer la pensée de Certeau pour en tirer des outils d’observation et de réflexion pour le champ d’étude de la communication en général et les études de la réception des médias. Bien qu’il ait été écrit avant l’arrivée des téléphones intelligents et des médias sociaux, le travail de décryptage de Proulx permet d’établir les bases pour l’élaboration d’approches renouvelées, utiles pour observer l’intégration de nouvelles technologies.

Revue de littérature – cadre théorique


Proulx relève chez Certeau un cadre théorique multidisciplinaire en trois volets : linguistique, polémologique et sociologique. Ce cadre théorique est posé en trois postulats de base qui constituent les lignes directrices de son analyse. Le premier postulat relevé par Proulx chez Certeau, celui-ci inspiré de la linguistique, est qu’il y a un écart entre la représentation offerte par la production dominante (institutionnelle) et celle que s’approprie effectivement son utilisateur. Le deuxième postulat relevé par Proulx, celui-ci polémologique, est le fait qu’il y a un rapport de force entre ce qu’il appelle les dominants, et les usagers. Enfin, le troisième postulat de Certeau, relevé par Proulx, celui-ci sociologique, est la supposition que les pratiques quotidiennes sont observables et qu’elles obéissent à une certaine logique.

Démarche méthodologique


À partir d’une lecture attentive de l’ouvrage de Certeau, Proulx identifie les concepts pertinents pour le champ de recherche de la réception des médias. Il complémente sa lecture par une revue de la littérature des autres textes de Certeau, de ceux de Luce Giard, son héritière intellectuelle, ainsi que des principaux auteurs ayant contribué à ce champ de recherche, notamment Blumer, Liebes, Katz, Silverstone, Jouet et Morley.

Résultats


Dans sa relecture de Certeau, Proulx démontre que les concepts de stratégie et de tactique, développés par Certeau, procurent un cadre d’analyse pertinent pour les problématiques liées aux médias, du fait qu’ils permettent de se distancer de la présupposition d’une passivité des usagers.

Discussion et poste de réflexion


Selon Proulx, bien que l’approche de Certeau vient enrichir les études des médias, elle comporte certaines faiblesses. Du nombre, alors que Certeau croit fermement qu’il y a un déplacement du pouvoir vers la masse, Proulx fait remarquer que dans un cadre communicationnel, l’anticipation des pratiques de résistance fait dorénavant partie intégrante du processus d’offre de nouveaux objets techniques.