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Fiches de lecture

A Narrative Approach to Strategy as Practice: strategy making from texts and narratives

De LA VILLE I. et Mounoud E. (2010), A Narrative Approach to Strategy as Practice: strategy making from texts and narratives, in GOLSORKHI D.,ROULEAU L., SEIDL D. & VAARA E. (Eds.), Cambridge Handbook of Strategy as Practice, Cambridge University Press, 183-197.

 

Fiche de lecture réalisée par Johanie Bouffard

Résumé


Cet article s’intéresse au rôle stratégique des histoires et narrations banales prenant place dans les organisations qui, par leur existence même, donnent un sens aux expériences quotidiennes et favorisent la coopération. Plus particulièrement les auteurs démontrent le rôle fondamental de la lecture (des documents formels) en tant que processus nécessaire à la compréhension et à l’application des textes. De La Ville et Mounoud allègent que la création de la stratégie doit être considérée comme une combinaison de la production de documents écrits et de leur « consommation créative » dans les activités quotidiennes des différents acteurs.

Keywords


Building, Dwelling, creative consumption, daily activities, narrative perspective, organisations, formal practices, strategy formation.

Méthodologie


Cet article ne présente pas de méthodologie appuyée sur une collecte de données empiriques. Elle tente plutôt de démontrer, grâce à une revue de la littérature, que la formation d’une stratégie organisationnelle est possible lorsque tous les acteurs d’une organisation s’approprient les documents écrits afin d’en faire jaillir une stratégie.

Revue de la littérature et résultats


Les auteurs introduisent l’approche narrative de la stratégie en pratiques (strategy as practice) en faisant préalablement la distinction entre les modes de construction (building) et d’habitation (dwelling) dans la conception d’une stratégie du philosophe Heidegger. C’est en s’appuyant sur l’importance de la narration dans les organisations que les auteurs démontreront l’importance des écrits dans la conception et la gestion d’une stratégie. En effet, la formulation de stratégie induit une certaine narration dans le sens où les gestionnaires doivent considérer les événements passés et les résultats désirés dans la formulation d’une stratégie.

Dans un autre ordre d’idées, les auteurs suggèrent que les activités quotidiennes des praticiens se développent grâce aux conversations, ce qui engendre une certaine « chaîne de conversations ». Cette « chaîne » laisse, en quelque sorte, des traces de ces conversations dans les documents écrits en offrant des schémas d’interprétation qui donnent un sens aux événements futurs. Les auteurs appellent ce phénomène la « métaconversation ».

De la Ville et Mounoud s’intéressent également aux travaux de Czarniawska (1997) démontrant que la création d’une organisation se forge grâce aux activités quotidiennes des membres d’une organisation. L’auteure identifie deux types de conversations : celles de confrontation entre deux parties, et celles qui mènent à l’élaboration d’écrits imposant certaines normes de comportement et de décisions. Ces deux types de conversations résultent en une compétition féroce entre « l’instance de force » (stronger order), soit la source d’émission des documents officiels qui impose un certain cadre d’interprétation, et « la faible instance » (weaker order), qui elle, tente de construire un sens dans ses activités quotidiennes. Cette auteure soutient également que la stratégie est en fait une construction discursive relativement superficielle et détachée des réalités quotidiennes des membres d’une organisation. D’ailleurs, selon elle, le quotidien d’un membre d’une organisation se forge grâce aux nombreuses narrations qu’il construit en sélectionnant des événements, en structurant ses expériences et en construisant et transformant ses interprétations.

D’autre part, De la Ville et Mounoud s’intéressent à l’appropriation des textes et de leur « consommation créative ». Selon eux, les écrits stratégiques se caractérisent par leur plurivocité, puisque leur signification est non résolue et qu’ils sont ouverts à des différentes lectures dépendamment de la situation du lecteur. Dans ce contexte, la construction de stratégie peut être vue comme un processus créatif comprenant non seulement ce qu’écrivent les stratèges, mais aussi les manières dont les membres d’une organisation consomment et lisent ses productions écrites.