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Les mobilisations professionnelles de la notion d’E-réputation

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Entrée écrite par : Benoit Adrien Spéciel


Petit préambule aux conférences du Webinaire 2016

1 – Résumé de la conférence

Les mobilisations professionnelles de la notion de réputation reposent sur un ensemble de métriques supposées renvoyer à des notions complexes comme l’autorité, la confiance ou l’influence. Cette quantification ne va pas sans poser de questions sur les équivalences la sous-tendant (Desrosières, 2008). Ce travail de conversion paraît néanmoins passé sous silence voire occulté dans les solutions proposées par les agences spécialisées en e-réputation (Alloing, 2015). La difficile construction d’unités de mesure heuristiques a pourtant largement été documentée à propos des publics de médias plus anciens (Méadel, 2010). Les nombreuses nuances et limites à ces tentatives de quantification ont notamment été soulevées à la fois par les chercheurs et par les praticiens employant ces guides pour l’action au quotidien (Chariac, 2009). Cette communication souhaiterait donc interroger la mise en métriques de la réputation actuelle à l’aune de ces constats déjà effectués dans des contextes proches.

2 – Quelques questions sur les sujets abordés

Les questions suivantes ont été posées directement à M. Coutant et voici la retranscription de ses réponses :

Comment parvenez-vous à quantifier cette mobilisation de notion de l’E.-réputation?

A. COUTANT : «L’objectif de l’intervention est justement d’interroger la possibilité de le faire. Je ne suis pas certain personnellement que ceci soit possible. La situation actuelle au niveau des services d’e-réputation est de mobiliser un ensemble de mesures facilement obtenues en ligne (like, retweets, mentions, etc). Le problème est qu’au niveau théorique, cela renseigne uniquement sur la diffusion, donc pourquoi pas de la notoriété, mais pas sur des mécanismes sociaux plus complexes comme l’autorité, la confiance, etc.

Il me semble donc qu’il y a un raccourci entre réputation et notoriété qui trouble beaucoup la compréhension des mécanismes d’influence en ligne.

Pour réduire ce trouble, j’envisagerai plusieurs étapes : définir précisément de quoi on parle (un problème fréquent lorsque l’on travaille sur des termes plutôt forgés par les praticiens) en mettant en correspondance les notions que j’évoquais plus haut, analyser l’emploi de traces d’activités dans d’autres médias et interroger comment les indicateurs disponibles renseignent ou non sur les termes bien définis précédemment.»

 

Peut-on vraiment parler de similitude entre ces mesures quand on parle de public pour les médias traditionnels, et d’influenceurs pour les médias sociaux?

A. COUTANT : «Il faudrait déjà définir sérieusement les influenceurs… souvent ils sont un remix des leaders d’opinion plus ou moins avoué. Et toutes ces théories : stakeholders, gatekeepers, leaders d’opinion ou les questions sur le cadrage, l’agenda, etc… Sont issues des études sur la “réception” des médias traditionnels.

Sur le plan des usages, les études soulignent aussi que les médias socionumériques sont le lieu de conversations parfois, mais tout autant de diffusions unilatérales, hiérarchisées, etc. Des résultats très similaires à la sociologie des médias donc. Par exemple, que regarde-t-on sur Youtube ? Des chaines. Rien de bien révolutionnaire.

Enfin, les “influenceurs” sont aussi mobilisés dans le cadre d’une capacité à intéresser voire convaincre des publics. Au delà du discours promotionnel et focalisé sur les changements de supports, les enjeux stratégiques sont en définitive assez stables.»

 

Quelles sont les raisons du passage sous silence de ces études ?

A. COUTANT : «Du côté des praticiens, il y a certainement un intérêt à sur insister l’aspect révolutionnaire de ces espaces pour se positionner face aux stratèges classiques de la communication. Mais on ne peut pas leur en vouloir, ils ne sont pas là pour penser les phénomènes.

Du côté des académiques, je vois deux biais : 1. une spécialisation trop grande. Lorsque l’on analyse des phénomènes complexes, elle finit par nous faire perdre de vue le phénomène dans sa globalité. Ici, les spécialistes des usages ou des RP ne dialoguent pas nécessairement avec les spécialistes des études de “réception”, les historiens des médias, les spécialistes de la consommation, etc. Il faut dire que c’est éreintant d’essayer de suivre plusieurs domaines au rythme des publications actuelles ! 2. nous sommes aussi certainement un peu fainéants et poussés par ces mêmes rythmes de publication, ce qui nous amène, dans la manière de mener nos recherches, à ne pas toujours consacrer le temps de problématisation nécessaire à bien définir notre objet sur des bases justifiables théoriquement.»

 

3 – Pour aller plus loin

Voici une suggestion de lecture du conférencier pour effectuer une entrée en matière du sujet abordé :

 

ALLOING, Camille. 2015. « Votre entreprise plus nette sur le Net» .Communication. Vol 33/2.

En ligne : http://communication.revues.org/6060

 

CARDON, Dominique. “à quoi rêvent les algorithmes”.

 

Coréalisé avec Lara-Catherine Desrochers

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