Par : Marc-André Tremblay
De nos jours, la plupart des organisations sont conscientes de l’importance de l’opinion de leurs publics. À preuve, plusieurs grandes entreprises ont mis sur pieds un service à la clientèle, incluant notamment une gestion des plaintes, qui est désormais joignables autant sur place que par téléphone et sur le Web. Ainsi, de telles actions ne sont plus simplement des efforts de service à la clientèle; elles s’inscrivent plutôt dans leur démarche globale de relations publiques.
Cependant, dans un futur proche, il semble que de gérer les plaintes reçues ne suffira plus. En effet, il y a maintenant beaucoup de commentaires négatifs qui se retrouvent à la vue de tous plutôt qu’entre les mains de ceux qui sont payés pour les gérer, c’est-à-dire sur les médias sociaux. Non seulement s’agit-il d’une tribune supplémentaire pour qu’un consommateur exprime ses pensées sur le service qu’il a reçu, mais avec ces plateformes, leurs opinions obtiennent une plus grande portée, et ce, plus rapidement qu’avec le bouche-à-oreille.
On assiste donc à un déplacement des commentaires négatifs vers les médias sociaux. Mais ce n’est pas tout : sur ces mêmes plateformes sociales, des insatisfaits autrefois silencieux choisissent maintenant d’exprimer leur mécontentement. En ce sens, il est possible de croire que les spécialistes du service à la clientèle devront tôt ou tard être mêlés à la gestion des médias sociaux en entreprise parce qu’une partie de leur champ de bataille s’y retrouve désormais.
De quelle manière l’univers du service à la clientèle et celui des médias sociaux pourront-ils se rencontrer dans les organisations? Malheureusement, il n’existe pas de recette miracle; cependant, il existe différentes pistes de solution, chacune ayant ses avantages et ses inconvénients. En voici quelques-unes.
Intégrer un responsable du service à la clientèle à l’équipe de médias sociaux
Pour assurer une gestion cohérente des plaintes reçues par le service à la clientèle et celles publiées sur les médias sociaux, il apparaît nécessaire qu’au moins une personne dans l’organisation ait un pied dans les deux équipes. Par exemple, une personne travaillant dans le service client pourrait être attitrée à répondre à tous les commentaires négatifs sur les médias sociaux de l’organisation et à rediriger ses auteurs vers le service à la clientèle.
La gestion des commentaires, surtout négatifs, peut s’avérer complexe. C’est que, souvent, la résolution du problème soulevé dans un commentaire sur les médias sociaux se transporte au-delà du média social lui-même. Par exemple, si un utilisateur affirme avoir eu à payer en double pour un service, la problématique va au-delà de la plateforme sociale puisqu’il faudra probablement le rembourser. Le gestionnaire de communauté n’est donc pas en mesure de régler le problème à lui seul : dans ce cas de figure, il est nécessaire que la personne soit prise en charge par le service à la clientèle ou la direction des relations publiques.
Il est donc nécessaire que la cohésion entre la gestion des médias sociaux et celle du service à la clientèle soit optimale pour pallier à ce type de scénario. Dans une plus petite organisation, cela peut tout simplement se traduire en la nomination d’une personne chargée de gérer à la fois les relations avec la clientèle et les médias sociaux. Quoi qu’il en soit, ces deux fonctions doivent être intégrées à la stratégie globale de relations publiques, tant dans les petites que les grandes organisations.
Créer un schéma de gestion des commentaires et des stratégies de réponses
Le fait que les spécialistes de la relation client en relations publiques prêtent main-forte aux gestionnaires de communauté est un pas dans la bonne direction; mais ce n’est pas suffisant. Lorsque des commentaires négatifs ou des situations problématiques éclatent sur les médias sociaux, il est nécessaire que le bon geste soit posé, et ce, dans les délais les plus courts possible.
Dans cette optique, les actions à prendre et les personnes qui en sont responsables doivent être déterminées à l’avance. En ce sens, la mise sur pied d’un schéma de gestion des commentaires permet de planifier, selon la nature des commentaires (positifs, négatifs, neutres, questions, troll, etc.), comment réagir. Nous avons d’ailleurs publié un exemple de schéma de gestion des commentaires efficace dans notre boîte à outils .
Dans la même optique, il est préférable d’anticiper le type de commentaires négatifs sur les médias sociaux et de prévoir à l’avance des stratégies de réponses. Par exemple, une organisation devrait prévoir ce qu’elle répondra si on l’insulte, si on lui reproche la lenteur de son service à la clientèle. Toutefois, il ne s’agit pas de détailler toutes les réponses en profondeur, mais plutôt d’identifier les options possibles, que ce soit de s’excuser, de se défendre, de rediriger l’utilisateur vers le service à la clientèle, etc.
Créer un compte distinct pour le service à la clientèle
En plus de leurs comptes habituels sur les médias sociaux, certaines entreprises ont choisi de créer un deuxième compte dédié uniquement au service à la clientèle, notamment sur Facebook et sur Twitter. Ce faisant, le compte principal de l’organisation peut se concentrer à échanger avec ses abonnés sur les passions et les intérêts qu’elle a en commun avec eux afin d’entretenir une relation positive. Concrètement, il est espéré que cette séparation permette de transférer une partie importante des commentaires négatifs vers le compte du service à la clientèle, qui assurerait ainsi la prise en charge des utilisateurs mécontents.
Cette possibilité peut sembler avantageuse à première vue, mais est-ce réellement le cas? C’est difficile à dire. Ce qui est clair, toutefois, c’est que de créer un compte supplémentaire dédié au service à la clientèle est loin d’être une solution miracle. Il importe ainsi de soulever une importante limite de cette stratégie.
Au moment de rédiger un commentaire sur les médias sociaux, l’utilisateur a la liberté d’adresser son commentaire à qui il le souhaite. Il peut ainsi emprunter le canal prescrit par l’entreprise en écrivant au compte Facebook ou Twitter dédié au service client. Toutefois, un utilisateur fâché pourrait aussi décider de contrer la stratégie de l’organisation en écrivant un commentaire négatif sur le compte principal de l’entreprise ou sur son propre compte. En somme, il y a un risque élevé que le canal mis sur pied pour gérer les plaintes ne soit finalement pas le destinataire de ces plaintes, et ce, sans qu’on en ait le contrôle.
Il serait donc utopique de croire que la création d’un compte distinct pour les relations avec les clients engendrera un déplacement de tous les commentaires négatifs vers celui-ci. Cela ne signifie pas forcément que de gérer les plaintes dans un compte à part est une mauvaise idée. Il est donc important d’y être sensibilisé en tant que relationniste.
En somme, il existe différentes façons de transposer les démarches de relation avec la clientèle sur les médias sociaux et il revient à chaque organisation de choisir celle qui lui convient le mieux. Toutefois, il appert qu’à l’ère du numérique, une partie du travail des spécialistes du service à la clientèle se trouve maintenant sur les médias sociaux. De ce fait, on pourrait assister tôt ou tard à une transcendance grandissante des frontières entre les professionnels de ces deux domaines.